Amiens, tome 2 : de la Paix d’Amiens à nos jours , Guillaume Magni (scénario), Stéphane Cuvillier (documentation et textes historiques), Alex-Imé, Maximilien Delfau, Anne-Claire Giraudet, Julien Margerit, Lucio Merckaert, Nicolas Hitori De, Anthony Rico. (dessins et couleurs). Éditions Petit à petit, 80 pages, 18,90 euros. (Parution 4 octobre 2023)
Trois ans après le premier volume, de Samarobriva à l’époque des guerres de religions, voici donc le second tome de cette histoire de la ville d’Amiens. De 1802 à nos jours. La période historique est plus resserrée mais s’illustre encore en neuf chapitres, de la signature de la Paix d’Amiens, en 1802, jusqu’à la découverte de la « Vénus de Renancourt » en passant par la construction de la Tour Perret, au début des années 1950, l’évocation de Jacques Boucher de Perthes et de Jules Verne ou de Joseph Pinchon (le créateur de Bécassine), mais aussi des dégâts de la Guerre de 14-18 ou de l’opération Jéricho.
Une fois encore, le scénariste Guillaume Magni a choisi d’évoquer la Grande Histoire par ses à-côtés, par la bande donc, appuyé par les textes documentaires synthétiques mais riches et complémentaires de Stéphane Cuvillier. Côté dessin, le collectif est moins étoffé, mais non moins talentueux.
Chaque épisode est donc évoqué de biais, et avec un manuscrit de citations, se transmettant et s’enrichissant au fil des années et des épisodes.
La Paix d’Amiens, éphémère cessez-le-feu entre l’Empire napoléonien et l’Angleterre est ainsi rappelée à travers les peintres en charge d’immortaliser la signature du traité et une petite réflexion sur la peinture académique, le tout illustré, de façon très colorée mais une mise en page un peu tassée par Maximilien Delfau.
Pour Boucher de Perthes, le « père de la préhistoire », évoqué ici dans les fouilles amiénoises du quartier Saint-Acheul, c’est un jeune apprenti qui sert de protagoniste, embarqué non pas dans l’histoire de la fameuse « mâchoire » mais plus prosaïquement dans un trafic de faux silex taillés, le tout traité de façon très expressif et dans une belle mise en couleur par Alex-Imé.
Anne-Claire Giraudet s’impose, avec un style singulier, à travers deux récits très différents : la vie de Jules Verne contée par sa gouvernante et les bombardements d’Amiens durant la Première Guerre mondiale vus à hauteur d’enfant.
Nicolas Hitori De, au trait toujours aussi fin et anguleux met particulièrement bien en scène l’histoire la plus originale de l’album, mêlant brillamment le rappel de l’existence d’un « village indigène sénégalais » monté lors de l’exposition internationale de 1906 et les débuts du syndicalisme, en cette même année ou fut signé la Charte d’Amiens, socle de l’indépendance syndicale à la française (ce qui ne veut pas dire l’absence d’action politique).
Le jeune Anthony Rico, avec un dessin encore un peu léger parfois, a la charge d’évoquer la mystérieuse opération Jéricho, bombardement de la prison d’Amiens en 1944 dont on débat encore de l’objectif réel, parvenant à basculer du burlesque au tragique en quelques cases.
Même approche dans l’épisode sur la construction de la tour Perret, montrée à travers le dialogue entre un des ouvriers de l’édifice et sa vieille mamie acariâtre refusant de quitter son taudis ravagé par les bombardements et pestant contre l’inutilité de construire un tel building. Si Lucio Merckaert n’avait pas impressionné dans le tome 1, il se montre beaucoup plus à l’aise, jouant bien de la verticalité de la tour.
Dans un style épuré mais un peu trop approximatif et froid, Julien Margerit fait revivre, lui, un Joseph Pinchon vieillissant de retour dans sa ville d’Amiens, occasion d’une petite explication pédagogique sur la naissance de la « ligne claire » chez le Père de Bécassine. Et c’est encore lui qui conclut l’album, autour de la découverte de la « Vénus de Renancourt ». Pas forcément l’histoire la plus forte, mais une manière logique de boucler la boucle en renvoyant à la préhistoire de la cité samarienne.
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