Vidéos. « On est heureux Nationale 10 » : la RN 10, toute une histoire

La lutte contre le réchauffement climatique incite à la délaisser pour le train mais, pour de multiples raisons, la voiture reste encore le moyen de transport privilégié des Français, notamment pour les vacances d’été. Les routes qu’ils empruntent alors, souvent en famille, ont fini par symboliser l’été, le soleil, l’envie d’évasion et tous les plaisirs à venir, au bout du voyage… et des bouchons.

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Dans le sud-est du pays, c’est la fameuse Nationale 7, chantée par Charles Trenet, qui relie Paris à la lumineuse Méditerranée. Et dans le Sud-Ouest, c’est la RN 10 qui descend de Paris direction le sud, le Pays basque, la frontière espagnole, le Portugal et au-delà, Gibraltar, le Maroc et l’Afrique…

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Si le fou chantant avait été Bordelais, Bayonnais ou Biarrot, parions qu’il aurait dédié son ode insouciante et joyeuse à la route mythique qui mène vers la péninsule ibérique. Long à l’origine de 762 km, son parcours historique…

La lutte contre le réchauffement climatique incite à la délaisser pour le train mais, pour de multiples raisons, la voiture reste encore le moyen de transport privilégié des Français, notamment pour les vacances d’été. Les routes qu’ils empruntent alors, souvent en famille, ont fini par symboliser l’été, le soleil, l’envie d’évasion et tous les plaisirs à venir, au bout du voyage… et des bouchons.

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Dans le sud-est du pays, c’est la fameuse Nationale 7, chantée par Charles Trenet, qui relie Paris à la lumineuse Méditerranée. Et dans le Sud-Ouest, c’est la RN 10 qui descend de Paris direction le sud, le Pays basque, la frontière espagnole, le Portugal et au-delà, Gibraltar, le Maroc et l’Afrique…

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Si le fou chantant avait été Bordelais, Bayonnais ou Biarrot, parions qu’il aurait dédié son ode insouciante et joyeuse à la route mythique qui mène vers la péninsule ibérique. Long à l’origine de 762 km, son parcours historique remonte aux Gaulois et elle se situe depuis toujours au cœur des relations diplomatiques, économiques, entre la France et l’Espagne.

Des Gaulois aux pèlerins de Compostelle en passant par les Romains

Les origines de la Nationale 10 remontent à la nuit des temps. Les Ligures, les Celtes puis les Gaulois tracent les premiers chemins qui donneront naissance aux voies romaines, construites dans l’Antiquité par les légions de César, pour faciliter leurs déplacements. Dès le Ier siècle avant J.-C, l’embryon de la future route d’Espagne existe déjà : l’axe qui relie Lutetia (Paris) à la péninsule ibérique en passant par Cenabum (Orléans), Caesarodunum (Tours), Limonum (Poitiers), Mediolanum Santonum (Saintes), Burdigala (Bordeaux) et Aquae Augustae (Dax) préfigure son tracé actuel.

La « Via Turonensis «

Après l’effondrement de l’Empire romain d’Occident au VIe siècle, la plupart des voies romaines sont laissées à l’abandon. Les axes tracés par les Romains dans le grand sud-ouest du royaume de France reprennent du service au Moyen Âge, au Xe siècle, grâce aux pèlerins en route vers Saint-Jacques-de-Compostelle, toujours de plus en plus nombreux à les emprunter pour se rendre en Galice, au nord-ouest de l’Espagne.

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La “Via Turonensis”,  ou voie de Tours, demeure la liaison la plus utilisée depuis Paris jusqu’à l’Espagne. Elle suit le tracé initié par les Romains, jusqu’à Saint-Jean-Pied-de-Port. Dès le XIIe siècle, « Le guide du pèlerin » décrit son itinéraire ainsi que les hôtelleries qui la jalonnent. De nombreuses sculptures de coquilles Saint-Jacques sont encore visibles sur son parcours.

L’essor commercial que connaît l’Occident à partir du XIe siècle favorise aussi le développement des routes. Dans le Sud-Ouest, les marchands font transiter le vin bordelais par navires mais aussi par la route. La guerre de Cent Ans (1337-1453) stoppe cette dynamique.

La Grande Route de Bordeaux à Paris

L’invention de la poste royale

Renouant avec la tradition gallo-romaine, Louis XI va structurer au XVe siècle les routes du pays en créant la première poste royale. Il s’agit d’organiser un système de relais « postés », afin de pouvoir obtenir des informations, discrètement et dans les plus brefs délais, de l’ensemble de son royaume. C’est le premier réseau de poste français. Distants de sept lieues chacun, les postes aux chevaux couvrent peu à peu le pays. La route de Paris à Bordeaux vers l’Espagne est l’une des premières du royaume à être « mise en poste », ponctuellement dès 1480, puis entièrement dans la première moitié du XVIe siècle.

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Henri IV ouvre cette poste au public, en 1603, et poursuit la modernisation du réseau routier en privilégiant les routes qui mènent aux frontières, pour d’évidentes raisons militaires. Sully fait ainsi planter de grands ormes le long de la Grande Route de Bordeaux à Paris, pour leur ombrage mais aussi pour la fabrication de châssis de canons. Il met également en place une « corvée de la route » pour son entretien : réfection de la chaussée, réparation des passages dégradés et consolidation des ponts.

La route du mariage de Louis XIV

À la fin du XVIIe siècle, la future RN 10 passe toujours par Orléans, Blois, la Touraine, puis elle parcourt le Poitou et l’Angoumois, en évitant toutefois encore Ruffec, Mansle et Angoulême au profit de Villefagnan et Châteauneuf. Après la Saintonge, de Barbezieux jusqu’à Montlieu, la route pénètre en Guyenne. Elle traverse la Dordogne à la hauteur de Cubzac et la Garonne à Bordeaux grâce à des bacs, avant la construction des ponts. Le reste de l’itinéraire jusqu’à la frontière espagnole ne variera plus : les Landes, Bayonne et Saint-Jean-de-Luz.

C’est cette route que Louis XIV empruntera en mai 1660 pour épouser l’Infante d’Espagne, Marie-Thérèse d’Autriche, à Saint-Jean-de-Luz, le 9 juin. Inconfortable, le voyage dure alors près de deux semaines : ce ne sont pas moins de 90 relais de poste qui couvrent les quelque 750 km de Paris jusqu’à l’Espagne.

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Les progrès du siècle des Lumières et l’empreinte de Napoléon

Alors que les échanges entre la France et l’Espagne se développent tous azimuts, la création du corps des Ponts et Chaussées en 1716 va restructurer le réseau des routes royales, en traçant de grandes radiales les plus rectilignes possibles. Leur largeur est uniformisée à près de vingt mètres. De nombreux ouvrages d’art sont construits, des ponts pour la plupart. Des fossés sont creusés et de nouveaux arbres plantés le long de la chaussée. Enfin, la « corvée des grands chemins » est généralisée en 1738. Elle sera finalement abolie à la veille de la Révolution.

Malle-poste au relais, 1805, Victor-Jean Adam, d’après Jean-Antoine Duclaux 1817 – Lithographie
Malle-poste au relais, 1805, Victor-Jean Adam, d’après Jean-Antoine Duclaux 1817 – Lithographie

Wikimedia Commons

Lorsque le siècle des Lumières s’achève, le réseau routier est dans un état remarquable. Les temps de parcours ont été pratiquement divisés de moitié en l’espace d’un demi-siècle, même s’il faut encore, au mieux, six jours pour relier en berline Paris à Bordeaux…

Une fois l’Empire proclamé, Napoléon donne priorité à la réfection des routes délaissées durant la période révolutionnaire. Pour le chef de guerre, ce sont des axes stratégiques qui sont l’objet de tous les soins du régime. Celle qui mène à l’Espagne, avec laquelle la France sera en guerre de 1808 à 1814, tout particulièrement. Élargissement et pavement de la chaussée, installation d’auberges pour ravitailler les soldats, construction de nombreux ponts, à l’image de ceux de Pont-à-Brac (Charente) ou de Bordeaux, le fameux pont de pierre, lancé par l’empereur en 1807 et achevé en 1822

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Et la route nationale n°10 naquit

En décembre 1811, la route de Paris à Bayonne est classée route impériale de première classe n°11.  C’est en 1824, lors de la renumérotation des routes sous la Restauration, que son tracé reçoit le numéro 10 qui ne la quittera plus. De route royale, elle devient route nationale n°10 avec la Monarchie de juillet, puis impériale sous le Second Empire. Il faudra attendre le retour de la République, en 1870, pour qu’elle redevienne définitivement la route nationale 10.

Tout au long du XIXe siècle, son histoire va refléter les progrès réalisés à l’époque dans les domaines des transports et des communications. Plus rapides, les diligences se multiplient. La ligne Paris-Bayonne du télégraphe optique de Claude Chappe, mise en service en 1822, suit son trajet de près. Quelques lieux-dits qui la jouxtent portent encore aujourd’hui le nom de « Télégraphe », témoignant de l’implantation d’un relais à cet endroit.

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La concurrence du rail

Alors qu’on cherche aujourd’hui à diminuer l’impact du déplacement automobile pour des raisons environnementales, en redéveloppant notamment le rail, il est utile de se rappeler que c’est justement l’invention du chemin de fer, plus rapide que la diligence, qui a mis un frein à l’expansion de la route, au XIXe siècle.

Décidée dès 1838, la liaison ferroviaire Paris-Bordeaux sera achevée en 1853 par Napoléon III, fervent partisan du rail pour l’aménagement du territoire… Et qui se servait aussi du train pour partir en vacances, à Biarritz. Poursuivie jusqu’à Irún en 1864, la voie ferrée suit la route nationale n°10 depuis Tours jusqu’à Bordeaux, s’en écarte dans les Landes avant de la rejoindre à Dax jusqu’à la frontière espagnole.

Les maîtres des relais de poste voient alors le trafic routier inexorablement diminuer au profit du chemin de fer. Le télégraphe électrique qui se généralise dans les années 1850 porte un coup fatal aux lignes et relais de poste, supprimé en 1873.

Le bouchon de Saint-André-de-Cubzac sur la RN 10 dans les années 1970.
Le bouchon de Saint-André-de-Cubzac sur la RN 10 dans les années 1970.

Archives Sud Ouest/Michel André

C’est l’avènement du règne de la voiture au XXe siècle qui va redonner des ailes à la route, quitte à la rendre dangereuse… et coresponsable du réchauffement climatique.

Le « cimetière des Portugais »

Concurrencée par l’A 10, la plus longue autoroute de France avec ses 557 km qui relie Paris à Bordeaux et fut mise en service de 1960 à 1981, la RN 10 a également accueilli dans le passé de fameuses courses automobiles et cyclistes… La première course auto de grande ampleur a eu lieu en 1895 : un Paris-Bordeaux aller-retour, remporté par une Panhard. En cyclisme, le premier Bordeaux-Paris date de 1891. Une institution. Et puis, au cours des siècles, elle fut aussi la route ancestrale des différentes vagues de migrations politiques et économiques vers la France, des Portugais, Marocains, Espagnols… Au bout de la route : Bordeaux.

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La RN 10 n’est pas que la « route du bonheur » ou celle de l’espoir de lendemains meilleurs. Itinéraire de prédilection lors des week-ends des grands départs et retours de vacances d’été pour les immigrés portugais et marocains en France et en Belgique, elle fut aussi surnommée le « cimetière des Portugais », en raison de son accidentologie élevée, plus particulièrement au sud de Bordeaux. La longue épopée de sa mise à 2×2 voies entre Poitiers et Saint-André-de-Cubzac, dans laquelle « Sud Ouest » a joué un rôle important en lançant l’opération « Doublons la RN 10 » dans les années 1970, puis la concession autoroutière de Belin-Béliet à Saint-Geours-de-Maremne, ont toutefois contribué à la rendre moins dangereuse.

Départementalisée, détournée ou engloutie par l’A63, aujourd’hui, seule la moitié de son parcours initial de la Grande Route de Bordeaux à Paris est encore estampillée RN 10. Mais son souvenir est toujours aussi vivace. Et elle reste encore partout la « Nationale 10 ».

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